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la loi du 23 mars 2019 sur le droit de la famille

par Maitre B DRAVET

L’impact sur le droit de la famille de la loi du 23 mars 2019 de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice

Ref. : Loi n° 2019-222 du 23 mars 2019, de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice (N° Lexbase : L6740LPC)

commentaires d' Adeline Gouttenoire, Professeur à la Faculté de droit de Bordeaux, Directrice de l'Institut des Mineurs de Bordeaux et Directrice du CERFAP, Directrice scientifique des Encyclopédies de droit de la famille paru dans lex base et reproduit ici par votre avocat#maitre b dravet avocat au barreau de Toulon

Même s’il n’en est pas l’objet principal, le droit de la famille, dans ses différents aspects, est largement concerné par la loi n° 2019-222 du 23 mars 2019, de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice. Les dispositions relatives au couple ou à l’enfant, s’inscrivent comme le reste du texte, dans une tendance à la libéralisation et à la simplification.

I - Le couple

La loi du 23 mars 2019 tend à favoriser la liberté matrimoniale -entendu comme la liberté de se marier mais aussi celle de ne pas ou de ne plus l’être-, directement en favorisant l’accès des personnes protégées au mariage ou plus généralement au couple et, indirectement, en facilitant le divorce.

A - La liberté de se mettre en couple des personnes protégées

Opposition. L’évolution des conditions légales de validité du mariage d’une personne sous tutelle ou curatelle répond à la volonté de renforcer l’autonomie personnelle des personnes placées sous tutelle ou curatelle en matière familiale [1]. Elle intervient alors même que la Cour européenne des droits de l’Homme a considéré dans un arrêt «Dellecole c/ France» du 25 octobre 2018 [2], après le Conseil constitutionnel [3]et la Cour de cassation [4], que la nécessité d’une autorisation du curateur ne porte pas une atteinte excessive à la liberté de se marier fondée sur l’article 12 de la Convention (N° Lexbase : L4745AQS) car elle est prévue dans l’intérêt du curatélaire et entourée de suffisamment de garanties pour être proportionnée. Désormais, cependant, en vertu du nouvel article 460 du Code civil issu de la loi du 23 mars 2019 (N° Lexbase : L7294LPT), le système est inversé : la personne protégée n’a plus besoin de l’autorisation de son tuteur ou de son curateur pour se marier, elle doit simplement informer ce dernier de son projet de mariage, lequel formera opposition s’il le juge nécessaire, sur le fondement de l’article 175 du Code civil modifié (N° Lexbase : L7298LPY), en vertu duquel «le tuteur ou le curateur peut former opposition, dans les conditions prévues à l’article 173 (N° Lexbase : L1875AB3) , au mariage de la personne qu’il assiste ou représente».

Convention matrimoniale. Toutefois, la loi permet désormais à la personne chargée de la mesure de protection, en vertu d’un nouvel alinéa de l’article 1399 du Code civil (N° Lexbase : L7292LPR), de saisir le juge des tutelles pour être autorisée à conclure seule une convention matrimoniale pour préserver les intérêts de la personne protégée. On accorde ainsi à cette dernière une autonomie personnelle plus importante tout en permettant à son tuteur ou curateur de lui imposer une protection de son patrimoine [5]. Le mariage en tant qu’acte personnel est plus accessible à la personne protégée mais ses effets patrimoniaux restent, logiquement, soumis à un contrôle, dans la mesure où elle ne peut passer seule une convention matrimoniale et que celle-ci peut lui être imposée.

PACS. Une évolution similaire s’applique au pacte civil de solidarité qui peut désormais être conclu par un majeur sous tutelle sans autorisation de son tuteur, le premier alinéa de l’article 462 du Code civil (N° Lexbase : L2582LBA), qui disposait que «la conclusion d'un pacte civil de solidarité par une personne en tutelle est soumise à l'autorisation du juge ou du conseil de famille s'il a été constitué, après audition des futurs partenaires et recueil, le cas échéant, de l'avis des parents et de l'entourage» ayant été supprimé. Toutefois, comme le curatélaire, la personne sous tutelle doit toujours être assistée de son tuteur pour conclure la convention, ce qui permet à la personne chargée de sa protection de contrôler l’impact du pacs sur son patrimoine.

Entrée en vigueur. Ces différentes dispositions ne faisant pas l’objet de précision dans la loi pour ce qui est de leur entrée en vigueur, celle-ci a eu lieu immédiatement.

 

B - La liberté de rompre le mariage

Pour favoriser la liberté de rompre le mariage, le législateur de 2019 a, à la fois, rendu l’accès au divorce plus facile au fond et a en a simplifié la procédure.

1 - Un accès au divorce facilité

Majeurs protégés. Les personnes protégées voient leur autonomie renforcée dans ce domaine également puisque le divorce pour acceptation du principe de la rupture du mariage (C. civ. art. 249-4 N° Lexbase : L7295LPU), classiquement rangé dans la catégorie des divorces amiables, leur est désormais accessible. Ils pourront accepter seuls le principe de la rupture, sans l’assistance de leur tuteur ou curateur, sous la réserve implicite -qui n’est pas contenue dans la loi mais reste certaine-, de disposer des capacités intellectuelles pour le faire. Cette capacité devrait être appréciée par le juge aux affaires familiales. En revanche, le divorce par consentement mutuel reste inaccessible aux époux sous tutelle ou curatelle, ce que l’on peut, sans doute, regretter. Le divorce par consentement mutuel judiciaire aurait pu leur être ouvert -le divorce extra judiciaire leur étant interdit par l’article 229-2 du Code civil (N° Lexbase : L2608LB9)-, la réalité du consentement de l’époux bénéficiant d’une mesure judiciaire aurait en effet pu être vérifiée par le juge aux affaires familiales.

Déjudiciarisation [6]. La déjudiciarisation du divorce largement entamée par la loi «J21» n° 2016-1547 du 18 novembre 2016 (N° Lexbase : L1605LB3), se poursuit avec la reconnaissance dans l’article 233, alinéa 2, du Code civil (N° Lexbase : L2791DZE), de la possibilité pour les époux de constater leur accord pour demander le prononcé d’un divorce sur demande acceptée, par acte sous signature privée contresignée par avocats [7], qui peut être conclu avant l’introduction de l’instance. Cette nouvelle possibilité permettra d’accélérer la procédure de divorce accepté, puisque le juge n’aura plus qu’à régler les effets du divorce, l’acceptation du principe de la rupture ne pouvant pas faire l’objet d’une rétractation. Cette disposition est de nature à satisfaire les couples réticents à divorcer sans passer devant un juge ou qui n’ont pas entièrement réglé les effets du divorce de manière consensuelle et qui souhaitent recourir au divorce accepté, dont la pratique récente montre qu’il est en nette augmentation. L’accès facilité au divorce accepté répond ainsi à la sociologie contemporaine du divorce.

Divorce pour altération définitive du lien conjugal. Alors que le délai de séparation conditionnant le divorce pour cause objective était déjà passé de six à deux ans en 2004, il est à nouveau réduit en 2019 [8], en passant à un an -ce qui est très court- permettant d’en favoriser nettement l’accès, étant précisé que la condition de la durée de séparation doit être réalisée au jour de la demande en divorce, et non plus au jour de l’assignation comme auparavant. Cette date est plus précoce du fait de la modification de la procédure supprimant la phase de conciliation (cf. infra), du moins lorsque, comme la loi le permet, la demande est ab initio expressément fondée sur l’altération définitive du lien conjugal [9]. En revanche, lorsque la demande en divorce ne mentionne pas les motifs du divorce, le délai caractérisant l’altération définitive du lien conjugal sera apprécié au prononcé du divorce en vertu du nouvel alinéa 2 de l’article 238 du Code civil (N° Lexbase : L7336LPE). Dans une telle hypothèse, comme le fait remarquer un auteur, «il sera possible de demander le divorce concomitamment au début de la séparation pour en obtenir le prononcé pour altération définitive du lien conjugal» [10]. La fin du délai de séparation exigé sera alors plus tardive. Les couples dont la séparation est récente ont donc plutôt intérêt à présenter une demande sans mentionner le cas de divorce qu’ils envisagent pour que le délai coure pendant la procédure. Il faut préciser que, comme auparavant, le délai d’un an n’est plus exigé «lorsqu’une demande sur ce fondement et une autre demande en divorce sont concurremment présentées» [11].

2 - La simplification de la procédure de divorce

L’exposé des motifs de la loi précise le double objectif poursuivi par la réforme à savoir la simplification du parcours processuel des époux en instance de divorce et la réduction des délais de traitement notamment dans les situations simples dans lesquelles il n’y a ni enfants mineurs, ni enjeux financiers importants.

Suppression de la phase de conciliation. L’outil principal employé pour la réalisation de ce double objectif est la suppression de la phase de conciliation. Cette réforme revêt tout d’abord une importance symbolique puisqu’elle traduit l’abandon par le législateur de l’office du juge consistant à tenter d’éviter le divorce. On considère désormais, et sans doute à juste titre, que les époux qui entament une procédure de divorce sont suffisamment décidés et qu’il est fort peu probable qu’ils renoncent à leur projet de séparation. Et même si une réconciliation intervenait en cours de procédure, ce ne serait certainement pas grâce au juge aux affaires familiales…

La procédure de divorce change donc complètement de physionomie. Terminées la requête initiale et l’assignation, remplacées par une seule demande en divorce. Celle-ci doit comporter, en vertu de l’article 252 du Code civil issu de la réforme (N° Lexbase : L7332LPA), le rappel des dispositions relatives à la médiation familiale, à la procédure participative et à l’homologation des accords partiels ou complets des parties sur les modalités d’exercice de l’autorité parentale, autrement dit aux divers moyens de pacification de la procédure, à l’égard duquel le législateur manifeste ainsi sa faveur.

Choix du cas de divorce. La demande en divorce pourra, en vertu du nouvel l’article 251 du Code civil, indiquer le fondement du divorce lorsqu’il s’agit d’un divorce pour acceptation du principe de la rupture du mariage ou d’un divorce pour altération définitive du lien conjugal. Lorsqu’il s’agit d’un divorce pour faute, cette indication continue d’être prohibée, et les motifs du divorce seront indiqués dans les premières conclusions au fond. Toutefois, en dehors de l’hypothèse du divorce pour faute, le choix du cas de divorce n’est pas une obligation pour le demandeur qui peut rester silencieux sur les motifs du divorce jusqu’à ses premières conclusions au fond.

Demande reconventionnelle. Dans chacune des hypothèses, le défendeur peut faire une demande reconventionnelle pour faute. Comme le prévoyait déjà le droit antérieur, c’est alors la demande en divorce pour faute qui est examinée en premier lieu par le juge et le cas échéant, face à une demande reconventionnelle en divorce pour faute [12], le demandeur peut faire évoluer sa demande de divorce pour altération définitive du lien conjugal en divorce pour faute, en exposant ses griefs à l’égard de son conjoint [13].

Lorsque les époux n’ont pas d’enfants et que leur séparation est déjà une réalité, la simplification de la procédure constituera un net progrès permettant d’alléger le parcours processuel de leur divorce.

Audience préliminaire. En revanche, lorsque les époux ont des enfants, ou/et que leur séparation n’est pas totalement organisée, il n’était pas possible d’attendre plusieurs mois le jugement de divorce, particulièrement en cas de conflits et de nécessité de prendre des mesures urgentes, sachant que l’article 257 du Code civil (N° Lexbase : L7170IMI) qui prévoyait ces dernières a été abrogé par la réforme. Pour répondre à cette nécessité, le nouvel article 254 du Code civil (N° Lexbase : L7330LP8) dispose que «le juge tient, dès le début de la procédure, sauf si les parties ou la partie seule constituée y renoncent, une audience à l’issue de laquelle il prend les mesures nécessaires pour assurer l’existence des époux et des enfants de l’introduction de la demande en divorce, à la date à laquelle le jugement passer en force jugée, en considération des accords éventuels des époux». Ainsi, cette audience est de principe sauf avis contraire des époux, notamment lorsqu’ils n’ont pas d’enfants et aucune question patrimoniale à régler rapidement. Il convient de rappeler que, dans les hypothèses graves de violences conjugales, une ordonnance de protection pourra organiser la vie des époux avant même la saisine du juge aux affaires familiales par une demande en divorce, laquelle permettra de renouveler d’ailleurs l’ordonnance de protection.

Point de départ des effets du divorce. La suppression de l’audience de non-conciliation et par voie de conséquence de l’ordonnance de non-conciliation a entraîné la modification de nombreux textes qui visaient cette dernière. C’est désormais la demande en divorce qui constitue, dans la plupart des cas, le point de départ des effets du divorce. Ainsi, l’article 262-1 (N° Lexbase : L7328LP4) dispose désormais que «la convention ou le jugement de divorce prend effet dans les rapports entre les époux, en ce qui concerne leurs biens […] lorsqu'il est prononcé pour acceptation du principe de la rupture du mariage, pour altération définitive du lien conjugal ou pour faute, à la date de la demande en divorce», sachant qu’en vertu du dernier alinéa de ce texte «à la demande de l'un des époux, le juge peut [toujours] fixer les effets du jugement à la date à laquelle ils ont cessé de cohabiter et de collaborer. Cette demande ne peut être formée qu'à l'occasion de l'action en divorce. La jouissance du logement conjugal par un seul des époux conserve un caractère gratuit jusqu'à l'ordonnance de non-conciliation, sauf décision contraire du juge». De même, le nouvel article 262-2 du Code civil (N° Lexbase : L7329LP7) prévoit que «toute obligation contractée par l'un des époux à la charge de la communauté, toute aliénation de biens communs faite par l'un d'eux dans la limite de ses pouvoirs, postérieurement à la demande en divorce, sera déclarée nulle, s'il est prouvé qu'il y a eu fraude aux droits de l'autre conjoint».

Filiation. Dans le cadre de la filiation, la référence à l’ordonnance de non-conciliation pour l’exclusion de la présomption de paternité dans l’article 313 du Code civil (N° Lexbase : L7327LP3) est remplacée par une référence à la demande en divorce ; il en va de même à l’article L. 2141-2 du Code de la santé publique (N° Lexbase : L7323LPW) pour ce qui est de l’impossibilité pour un couple séparé de recourir à l’assistance médicale à la procréation.

Entrée en vigueur. La loi du 23 mars 2019 prévoit que les dispositions relatives à la procédure de divorce entrent en vigueur à une date fixée par décret en Conseil d’Etat, et au plus tard le 1er septembre 2020. Lorsque la requête initiale a été présentée avant l’entrée en vigueur prévue à la première phrase du présent VII, l’action en divorce ou en séparation de corps est poursuivie et jugée conformément aux dispositions du Code civil dans leur rédaction antérieure à la même entrée en vigueur. Dans ce cas, le jugement rendu après ladite entrée en vigueur produit les effets prévus par la loi ancienne.

II - L’enfant

Les règles relatives à l’enfant sont concernées de manière moins importante par la réforme : elles sont constituées de quelques nouveautés ponctuelles, mais mettent surtout en place un dispositif destiné à favoriser l’effectivité des décisions rendues.

A - Des nouveautés ponctuelles

Filiation. La filiation est à son tour, quoique de façon encore très limitée, touchée par la déjudiciarisation. En effet, l’article 6 de la loi de programmation et de réforme de la justice transfère la compétence du juge pour établir les actes de notoriété, délivrés pour établir un lien de filiation par possession d’état, au notaire [14]. Le notaire chargé d’établir un acte de notoriété recueille le témoignage de trois personnes faisant état de leur connaissance de faits constitutifs de la possession d’état (C. civ., art. 311-1 N° Lexbase : L8856G9U). Malgré l’abrogation du dernier alinéa de l’article 317 (N° Lexbase : L3822IRY) selon lequel «Ni l'acte de notoriété, ni le refus de le délivrer ne sont sujets à recours», l’établissement par un notaire d’un tel acte ne peut faire l’objet d’un recours, en dehors de la contestation judiciaire de la possession d’état fondée sur un acte de notoriété prévue par l’article 335 du Code civil (N° Lexbase : L2873ABZ).

En matière d’assistance médicale à la procréation avec tiers donneurs, le notaire, déjà partiellement compétent pour recueillir le consentement du couple le devient exclusivement selon le nouvel article 311-20 du Code civil (N° Lexbase : L7277LP9).

Logement de la famille. Un nouvel article 373-2-9-1 du Code civil (N° Lexbase : L7188LPW) issu de la loi de programmation et de réforme pour la justice permet désormais au juge aux affaires familiales, saisi d’une requête relative aux modalités d’exercice de l’autorité parentale, d’attribuer provisoirement la jouissance du logement de la famille à l’un des deux parents, le cas échéant en constatant l’accord des parties sur le montant d’une indemnité d’occupation. Il fixe la durée de cette jouissance pour une durée maximale de six mois. Lorsque le bien appartient aux parents en indivision, la mesure peut être prorogée, à la demande de l’un ou l’autre des parents, si durant ce délai, le tribunal a été saisi des opérations de liquidation-partage par la partie la plus diligente. Ce dispositif, qui existait déjà pour les couples mariés, et qui pourra désormais être mis en place dans le cadre de l’audience préliminaire, permet au parent non marié, qui se voit attribuer la résidence des enfants, de maintenir le cadre de vie de ces derniers quel que soit le statut du logement de la famille.

B - L’exécution forcée des décisions relatives à l’autorité parentale

La loi du 23 mars 2019 de programmation et de réforme de la justice organise un renforcement bienvenu de l’effectivité des décisions rendues en matière familiale, en prévoyant expressément le recours à plusieurs modalités d’exécution forcée, dans des dispositions d’application immédiate, qui s’appliquent aux procédures en cours dès le lendemain de la publication de la loi.

Astreinte. Ainsi l’article 373-2-6, alinéa 4, du Code civil (N° Lexbase : L7365LPH), texte spécifique à l'intervention du juge aux affaires familiales en matière d'exercice de l'autorité parentale, dispose que «le juge aux affaires familiales peut, même d’office, ordonner une astreinte pour assurer l’exécution de sa décision. Si les circonstances en font apparaître la nécessité, il peut assortir d’une astreinte la décision rendue par un autre juge ainsi que l’accord parental constaté dans la convention de divorce par consentement mutuel». L'astreinte peut ainsi être prévue tant par la décision du JAF qui détermine les modalités de l’exercice de l’autorité parentale, que par une décision antérieure, y compris s'il s'agit d'une décision étrangère, à condition qu'elle ait un caractère exécutoire en France, dès lors que l'astreinte est nécessaire pour favoriser l'exécution. L'astreinte peut donc faire l'objet d'une demande principale voire exclusive, après inexécution, ou d'une demande accessoire à une demande relative aux modalités d'exercice de l'autorité parentale et/ou à la contribution et à l'entretien de l'enfant. Elle peut également être ordonnée d'office.

Amende civile. Selon l’article 373-2-6, alinéa 5, «le juge aux affaires familiales peut également, lorsqu’un parent fait délibérément obstacle de façon grave ou renouvelée à l’exécution d’une décision, d’une convention de divorce par consentement mutuel prenant la forme d’un acte sous signature privée contresigné par avocats déposé au rang des minutes d’un notaire ou d’une convention homologuée fixant les modalités d’exercice de l’autorité parentale, le condamner au paiement d’une amende civile d’un montant qui ne peut excéder 10 000 euros». Il faut donc établir le caractère délibéré de l'inexécution, ainsi que la gravité ou le caractère renouvelé de l'inexécution. La condamnation à une amende civile intervient nécessairement après inexécution, et par conséquent dans une décision ultérieure ; elle sanctionne à la fois l'inexécution acquise et tend, le cas échéant, à une meilleure exécution de la nouvelle décision si la demande de condamnation à une amende civile est accessoire à une demande principale en modification des modalités d'exercice de l'autorité parentale. L’adverbe «également» permet de considérer que l’amende civile peut, comme l’astreinte, être prononcée d’office par le juge, saisi après inexécution d’une demande modificative.

L’emplacement dans le Code civil des dispositions relatives à l'astreinte et à l'amende civile montre que ces mesures ne sont pas circonscrites aux hypothèses où l'enjeu est le maintien des liens entre l'enfant et l'un de ses parents mais qu'elles peuvent sanctionner l'inexécution tant des dispositions relatives à la résidence de l'enfant ou au droit de visite que des dispositions relatives à la remise du carnet de santé ou du passeport par exemple, ou à la contribution à l'éducation et à l'entretien de l'enfant [15].

Recours à la force publique. La loi de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice crée une nouvelle possibilité de recours à la force publique pour l'exécution des décisions en matière familiale, lorsque l'exécution forcée est nécessaire pour permettre le maintien des relations personnelles de l'enfant avec son père ou sa mère. L'exécution forcée concerne donc, en pratique, la fixation (ou le transfert) de la résidence habituelle de l'enfant, la résidence alternée ou le droit de visite et d'hébergement. Même dans ces hypothèses, le texte précise expressément que le recours à la force publique doit être exceptionnel. Une démarche préalable de médiation, une demande formelle d’exécution volontaire ou encore le recours aux nouveaux dispositifs de sanction pécuniaire doit avoir été entrepris. En outre, l’exécution forcée de la décision doit intervenir dans des conditions garantissant la prise en considération de l’intérêt de l’enfant. C'est la raison pour laquelle le choix de recourir à la force publique relèvera du Parquet, compte tenu de son rôle dans le dispositif de protection de l’enfance, de son expérience tirée des précédents des déplacements illicites internationaux et des placements au titre de l'assistance éducative et de sa connaissance de l'éventuel aspect pénal des situations (en cas de violences notamment [16]).

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